Le dispositif d’indemnisation des accidents du travail et maladies professionnelles (AT/MP) ne répond plus aux besoins des victimes.
Le trimestriel, A part entière, édité par la FNATH alerte sur ce système qui est obsolète et discriminatoire.
Accidents du travail et maladies professionnelles
Le système de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT/MP) est incomplet et injuste. Dès 2001, la Cour des comptes le qualifiait « d’obsolète, complexe, discriminatoire, inéquitable (et) juridiquement fragile ». Il y a près de vingt déjà, en 2001, année de la création du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, la ministre de l’Emploi et de la Solidarité, Elisabeth Guigou déclarait : « Nous allons vers la réparation intégrale, je crois que c’est une exigence forte, mais simplement, on ne peut pas improviser ce passage. Il faut que cela se fasse dans la concertation. »
Livre blanc
A l’époque, les conditions politiques semblaient réunies pour l’envisager. Près de 20 ans après, on n’a pas avancé et le gouvernement n’en parle plus ! En 2010, la Fnath publiait un Livre blanc.
Besoins des victimes
Aujourd’hui, tout le monde est d’accord, ou presque, pour dire que ce dispositif ne répond plus aux besoins des victimes. Il est illisible et émaillé d’exceptions génératrices d’inégalités. Créé en 1898, le système de réparation français des AT/MP a été considéré comme un compromis historique. Une véritable avancée sociale pour l’époque. La loi instaurait une présomption d’imputabilité au travail en cas d’accident survenu au temps et au lieu du travail. Le salarié n’avait plus à prouver que l’accident était lié au travail. En contrepartie, on lui proposait une réparation forfaitaire du dommage. « Forfaitaire » s’opposant à « intégral ».
Obsolète
En droit commun, lorsque quelqu’un est accidenté, il bénéficie en cas de tiers responsable, en principe, d’une réparation complète (ou intégrale) de tous ses préjudices. Réparation qui consiste à replacer la victime dans l’état où elle se serait trouvée si le dommage ne s’était pas produit.
Discriminatoire
Au tournant du XXe siècle, le compromis de 1898 était un progrès. Tout au long de ces 121 ans, victimes et pouvoirs publics ont tenté de compléter ce système. Deux avancées ont permis à deux populations de salariés de bénéficier d’une réparation complète ou presque de leurs préjudices.
Deux avancées :
- La loi Badinter en 1985 permet aux victimes de la route, passagers transportés ou en cas de tiers responsable, de bénéficier d’une réparation de l’ensemble des préjudices justifiés, et s’étend aux travailleurs victimes de la circulation ;
- Le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) en 2001, assure une réparation quasi intégrale des préjudices supportés par les personnes contaminées, salariés et ayant droit.
Faute inexcusable
Avec le scandale de l’amiante, en 2002, la Cour de cassation a facilité l’accès à la faute inexcusable de l’employeur en faisant peser sur l’employeur une obligation de résultat en matière de sécurité. Dans les faits, la faute inexcusable reste une indemnisation « améliorée » à laquelle peut prétendre le salarié, bien loin d’une indemnisation intégrale. En outre, cette procédure peut prendre près d’une dizaine d’années, la victime devant avancer, seule, tous les frais et honoraires.
Sous-indemnisées
Au tournant du XXIe siècle, suite à ces différentes décisions, l’indemnisation en cas de faute inexcusable de l’employeur s’est quelque peu améliorée. Mais elle est loin d’atteindre ce qu’une victime de droit commun est en droit d’attendre. L’élan s’est arrêté là. Aujourd’hui, les victimes du travail continuent d’être sous indemnisées. Ainsi, deux personnes qui chutent dans un magasin ne seront pas indemnisées de la même manière selon qu’elles sont salariées du magasin ou clientes. La différence pouvant atteindre, selon la gravité, jusqu’à 10 fois plus.
Préjudices
Ainsi, en cas d’AT/MP, le salarié qui ne peut faire reconnaître la faute inexcusable ne bénéficie d’aucun poste de préjudice à part le déficit fonctionnel permanent intégrant le préjudice économique, servis ensemble par un capital ou une rente AT/MP. Outre des indemnités journalières majorées pendant la période d’incapacité temporaire. Concernant les prothèses, appareillages, soins, traitements et la prise en charge de ses transports, ceux-ci sont calculés sur la base du barème « Sécurité sociale » qui ne correspond plus aujourd’hui aux besoins réels des victimes. Cela prive la victime d’un accident du travail (contrairement à une autre victime) d’un accès à un matériel de pointe, techniquement mieux adapté, sauf à ce qu’elle le finance sur ses propres deniers.
Incomplètes
Si un salarié obtient la faute inexcusable de son employeur, il peut bénéficier de la plupart des préjudices personnels comme les préjudices esthétique, d’agrément etc. Il obtient la majoration de sa rente. Mais dans son cas, la perte de gains professionnels passés et futurs, l’assistance d’une tierce personne, après consolidation, ne seront pas indemnisées, puisqu’inclus dans la rente forfaitaire. Les prestations en nature (frais médicaux et paramédicaux) sont incomplètes car accompagnées d’un reste à charge. La gratuité des soins promise au début devient de plus en plus virtuelle. Les victimes du travail sont confrontées aux franchises médicales, aux dépassements d’honoraire et doivent payer un impôt sur la moitié de leurs indemnités journalières.
© PLuton, rédacteur en chef
© Cécile Petitet
Interview de François Desriaux : un système discriminatoire
L’indemnisation des accidents du travail et maladies professionnelles défavorise les travailleurs par rapport aux autres citoyens. A part entière le démontre.
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