Finalement créée au cours de la crise du coronavirus, la cinquième branche va-t-elle faire les frais de la dégradation des comptes sociaux mobilisés justement pour faire face à la crise ?
Cinquième branche
On bien cru qu’on y était. Après au moins 15 années d’attente. A l’occasion de la crise du coronavirus, alors que les comptes sociaux sont mobilisés pour amortir les effets du confinement, les Pouvoirs publics se lancent. Enfin. Le gouvernement annonce, au printemps 2020, la création de la cinquième branche de la sécurité sociale consacrée à l’autonomie. Ou, plutôt, dédiée à la compensation de la perte d’autonomie au profit des personnes âgées et handicapées. Une décision historique.
Rapport
Dans la foulée, les lois sur la dette sociale et l’autonomie d’août 2020 posent les fondations de cette cinquième branche. Le gouvernement réclame un énième rapport à l’inspecteur des affaires sociales, Laurent Vachey, ancien directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Il doit notamment produire des propositions de nouvelles ressources, ou, plutôt de transfert de ressources, au profit de la CNSA. C’est cette dernière qui va gérer ce cinquième risque. Il faut trouver un milliard d’euros pour 2020. 3 à 5 d’ici 2024…
Autonomie
Une nouvelle ministre, Brigitte Bourguignon, est nommée à l’occasion d’un remaniement ministériel, en juillet. Elle ne souhaite pas au début définir le périmètre d’action de l’autonomie. Levée de bouclier des associations. Finalement, le rapport Vachey remis, mi-septembre, laisse apparaître que le handicap sera bien pris en compte dans ce périmètre. Au point de suggérer de réaliser des économies sur une partie de l’allocation adulte handicapé (AAH). Re-levée de bouclier. Pour ajouter à la confusion, ou à la temporisation, la nouvelle ministre chargée de l’Autonomie annonce pour cet automne une énième concertation appelée « Laroque de l’autonomie»… Finalement, ces questions financières doivent être examinées dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PFFSS) pour 2021. Lequel doit être examiné en seconde lecture à l’Assemblée nationale.
C’est long, c’est lent…
Patatras, alors que le processus semblait enclenché, c’est le président de la République, lui-même, qui annonce le report de la loi Grand âge, laquelle devait organiser la création de la cinquième branche. Elle n’est, à ce stade, qu’une coquille vide ! L’examen de cette loi avait été promis dès le début du quinquennat de Monsieur Macron. Il a été repoussé plusieurs fois. Prévus désormais pour le début 2021, l’examen puis l’adoption de ce projet semblent plus aléatoires à un an de la présidentielle. D’autres priorités imposées par la crise sanitaire et sociale risquent d’occuper les Pouvoirs publics. Sans compter la campagne électorale au cours de laquelle les candidats ne voudront pas trop se risquer ou se lanceront, au contraire, dans des promesses sans lendemain.
Inquiétude
Un rebondissement qui inquiète jusque dans les rangs de la majorité. La députée de Seine-Maritime, Agnès Vidal, a co-signé ainsi, avec 77 députés, une lettre ouverte au Premier ministre pour maintenir le projet de loi Grand âge à l’agenda parlementaire début 2021. Le rapport Libault remis en 2019, rappelle que 2,2 millions de personnes seront en perte d’autonomie en 2050, contre 1,3 million en 2017. Il faudra, selon ce rapport, créer entre 150 000 et 200 000 emplois en équivalent temps-plein dans le secteur du grand-âge et de l’autonomie d’ici 2030 !
Dégradation des comptes sociaux
Mais se profile une véritable crise des comptes sociaux. Rendant obsolètes les prévisions pour le grand âge et l’autonomie, réalisées avant la crise du coronavirus. Aucun retour à l’équilibre n’est vraiment prévu à ce jour. Preuve de l’étatisation de nos régimes sociaux, ils ont été ponctionnés. Pour la bonne cause. Certes, ils ont permis de contribuer à sauver une partie de nos emplois cette année. Mais ils frisent l’abîme alors que la Sécurité sociale fête ses 75 ans. Age fragile.
Coronavirus
Passé inaperçu, dans le grand public, qui devrait s’en préoccuper, le report de 9 ans, de notre dette sociale collective représente un impôt qui ne dit pas son nom. Un impôt insuffisant pour sa pérennité. Souhaitons que notre sécurité sociale ne finisse pas comme les géantes rouges de la galaxie, promises à l’extinction.
Pierre Luton
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